Procès de Sonia Imloul : précipitation et approximation de la déradicalisation en France

Le procès concerne Sonia Imloul, cette ancienne responsable d’une structure chargée d’accompagner les familles de jeunes tentés par le djihad. Elle est accusée de détournement de subventions, blanchiment et travail dissimulé. Cependant, derrière cela, c’est aussi le procès de la mise en place approximative d’action médiatique, là où il aurait fallu une action rigoureuse sereine.
Sur les faits, les autorités reprochent à Sonia Imloul d’avoir détourné des subventions, versées à hauteur de 60 000 euros. Les autorités lui reprochent également d’avoir employé trois personnes dans sa structure sans leur verser de salaire, ni leur fournir de contrats de travail. L’une de ces personnes, a finalement eu un contrat de travail antidaté et dit avoir perçu une somme d’argent.
Petit retour en arrière, nous sommes en avril 2014, alors que le départ de dizaines de jeunes Français vers la Syrie, fait la une des actualités, le gouvernement lance un plan de prévention. Apparaît alors, l’accusée, elle est âgée de 43 ans, et elle a été présidente de l’association Respect 93. Cette ex-militante du Nouveau Centre a fait un rapport sur la polygamie pour l’Institut Montaigne, un think tank classé à droite. Elle passe bien dans les médias, elle est chargée de piloter la première cellule de déradicalisation en France.
La structure est baptisée, « la Maison de la prévention et de la famille », elle accueille des familles envoyées par la préfecture de police de Paris, dans un appartement loué à Aulnay-sous-Bois (Seine-Saint-Denis). Il s’ensuit un emballement médiatique qui fait dire plus tard que l’on trouve dans cette structure plus de journalistes que de familles.
Un an plus tard, le constat est sans appel, cinq familles accueillies pour un travail de prévention, pour tenter d’empêcher par exemple un départ vers le djihad. Pourtant, la directrice de la structure évoquait devant les journalistes 30 familles pour une équipe annoncée de 10 à 15 personnes, qui en réalité compte cinq personnes. La structure ferme et les langues se délient.
Deux ex-employés ont alerté les autorités sur les dysfonctionnements de la cellule. Une mère dont la fille était partie en Syrie et qui avait intégré l’association pour suivre les familles de jeunes ayant rejoint ce pays, et Julien Revial, un étudiant recruté par Sonia Imloul, pour l’aider à bâtir le projet et accomplir divers travaux rédactionnels.
Dans son livre, « Cellule de déradicalisation, chronique d’une désillusion », le jeune homme dénonce le fonctionnement de la structure, et s’interroge. « Pourquoi les autorités n’ont pas investigué sur le profil de Sonia Imloul ? S’ils l’avaient fait, jamais cette mascarade ne se serait produite ».
Dans cette enquête, Sonia Imloul est notamment soupçonnée d’avoir utilisé un RIB falsifié pour faire virer 25 000 euros puis 35 000 euros de subventions destinées à la structure. Elle est également accusée, d’avoir effectué des virements au profit d’un ex-conjoint et de sa mère alors que l’association était subventionnée par le comité interministériel de prévention de la délinquance et de la déradicalisation (CIPDR) et par la préfecture de police de Paris.
La sénatrice Esther Benbassa, qui menait une mission parlementaire sur les politiques de désendoctrinement, a déclaré à France Inter, « plus on avançait, plus on se rendait compte qu’il y avait des associations qui s’étaient engouffrées dans le créneau parce que ça rapporte de l’argent, et que ces associations faisaient n’importe quoi. Je n’aime pas utiliser les mots d’escroc ou de charlatan, mais je parlerais de gens totalement incompétents ! Qui ne connaissaient pas le sujet du tout ! Ils auraient pu faire une formation en informatique ou tout à fait autre chose ».

Crédit photo : Patrick Belton

 

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