Festival d’Avignon : la fête ne fait pas oublier la précarité

Jeu, danse, musique, poésie… Comme chaque été, le rendez-vous incontournable de ceux qui aiment le spectacle vivant apporte du bonheur et de l’insouciance. Mais la précarité, notamment des artistes, n’est jamais très loin. Elle ne fait au contraire qu’augmenter depuis une vingtaine d’années.

 

La 17ème édition du festival a commencé le 6 juillet dernier. Quelque 300 représentations sont programmées dans le « In ». Mais l’essentiel est peut-être ailleurs, en tout cas en termes de programmation : pas moins de 1 500 spectacles seront joués dans le cadre du « Off », ce festival que l’on appelle parfois « alternatif » bien qu’il soit désormais au cœur même du grand rendez-vous du théâtre national et international.

Le Festival Off d’Avignon est en effet un des plus grands festivals de compagnies indépendantes au monde. Selon ses responsables, il a réuni 1 092 compagnies et 1 416 spectacles en 2016. Né en 1966 comme un espace de création artistique plus spontané et audacieux que le In, il constitue aujourd’hui une étape obligée pour tous ceux qui veulent se faire un nom dans le très compétitif monde de l’art et la culture en général et du spectacle vivant en particulier.

En effet, comme le révélait une étude du ministère de la Culture et de la Communication en 2014, « en vingt ans, le nombre d’artistes et de techniciens de l’audiovisuel et du spectacle vivant a doublé ». Si cette croissance témoigne du développement d’un marché du travail « extrêmement dynamique en termes de créations d’entreprises (tout particulièrement dans le spectacle vivant) », le ministère est plus nuancé lorsqu’il s’agit de commenter l’évolution de l’emploi dans le secteur.

Plus d’artistes, moins d’emplois

« La croissance des effectifs professionnels s’est effectuée à un rythme plus soutenu que celui de l’offre d’emploi, instaurant une dégradation des situations individuelles mesurée par la baisse de près d’un quart du volume annuel de travail et des rémunérations au cours des années 1990 », écrivent les auteurs de l’étude.

Cela se traduit par une flexibilité de l’emploi très fortement accrue, des durées de travail plus fractionnées et une plus grande dépendance aux indemnités chômage. Selon l’Insee, « les trois quarts des artistes français vivent de contrats courts (telle que l’intermittence), une proportion qui a doublé en vingt ans », rapporte BFM Business. « En pratique, un intermittent travaille donc deux fois moins qu’il y a trente ans, et gagne logiquement deux fois moins ».

Cette précarisation n’est jamais aussi évidente qu’à Avignon. Certes, le festival est un lieu de visibilité unique pour les artistes, mais chaque compagnie participant au Off doit financer « de A à Z la mise en scène de sa pièce, la location de la salle, la rémunération des acteurs, les frais d’affichage… La facture est lourde, et souvent peu rentable », souligne Pierre Beffeyte, directeur de l’association organisatrice du festival, Avignon Festival & Compagnies (AF&C).

Un coup de main pour la professionnalisation du Off

Or, les artistes ont beau aimer leur métier et profiter de l’ambiance incomparable de la cité des Papes, ils n’en ont pas moins besoin d’un coup de main pour exercer leur art. D’où l’idée de lancer un fonds de soutien pour les spectacles en création dans le Off.

Financé à hauteur de 112 000 euros par les organismes professionnels (notamment la SACD et le groupe Audiens) et 160 000 euros par AF&C (Avignon Festival et Compagnies), ce fonds sera dédié aux salariés artistiques pour les représentations ayant lieu pendant le festival. L’aide sera de 1 000 euros par artiste et plafonnée à 4 000 euros par projet, précisent les organisateurs.

Selon AF&C, ce fonds constitue « une étape supplémentaire dans la démarche de professionnalisation du festival, l’accompagnement aux compagnies et plus largement un soutien au secteur du spectacle vivant ».

Contrairement aux apparences, les Français restent profondément attachés aux sorties et aux lieux culturels. Soutenir le spectacle vivant et le « off » revient donc à soutenir un mode de vie dont l’importance se confirme chaque été. Nul doute qu’avec un tel soutien, l’inventivité et la créativité qui caractérisent la scène avignonnaise ne démériteront pas cette année.

 

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