« Moi, grosse », le film dénonciateur de grossophobie… accusé de grossophobie

Le téléfilm n’avait pas encore été diffusé, que déjà, il faisait parler de lui et posait les questions fondamentales de tolérance autours de la grossophobie : l’affiche du film représentait Juliette Katz, l’actrice principale, avachie dans un canapé, une pizza près d’elle, face caméra. Le lendemain de sa diffusion, alors que 3,12 millions de téléspectateurs avaient été au rendez-vous (pour 14% de part d’audience), la question centrale de la grossophobie s’est retournée contre la réalisatrice pour ses choix d’accessoires.

« Moi, grosse » a divisé l’audimat. Le téléfilm de Murielle Magellan, diffusé mercredi 15 mai sur France 2, adapte le témoignage de Gabrielle Deydier, auteure du livre, On ne naît pas grosse (éd. La Goutte d’Or).

Le topo : en raison de son poids, Raphaëlle (interprétée par Juliette Katz, YouTubeuse célèbre et auteure de la chaîne Coucou les girls) vit un véritable enfer discriminatoire depuis qu’elle cherche un emploi.

L’accessoire de trop

Le téléfilm pose la question sociétale de la grossophobie ordinaire. Pourtant, il a lui-même été accusé par des associations de lutte anti-grossophobe d’en utiliser les clichés. Des militants et internautes ont ainsi reproché à la réalisatrice de faire porter une « fatsuit » à Juliette Katz. Cet accessoire est une combinaison qui permet à la personne qui la porte de paraître plus gros.

Le personnage de Monica Geller, dans le célèbre sitcom Friends, est probablement l’exemple le plus connu d’une utilisation de cet accessoire, que son interprète Courtney Cox a porté dans certains épisodes de la série.

Un accessoire de trop pour Olga Volfson, journaliste pour le site Komitid et militante fat et body positive qui explique ; « Le fatsuit n’est pas qu’une simple combinaison, c’est aussi un outil de moquerie et d’oppression grossophobe ».

« Un problème d’éthique »

Anouch, militante pour Gras politique (association de lutte contre la grossophobie et la maltraitance médicale) a été « beaucoup touchée » devant « Moi, grosse » : « C’est violent : il s’agit d’un déguisement de corps gros, que l’on a utilisé pour justement parler de la grossophobie. Un téléfilm censé dénoncer les clichés a utilisé le plus gros cliché qui soit. », confie-t-elle.

Ce choix d’utiliser un « fatsuit » crée une invisibilisation des corps les plus gros, controverse d’autant plus polémique quand on sait que des comédiennes aux corpulences souhaitées se sont présentées au casting du film.

« Faire jouer le personnage principal par une personne qui n’a pas la corpulence souhaitée, ça pose un gros problème d’éthique », s’insurge Olga Volfson.

Le combat continue !

Gabrielle Deydier, l’auteure du livre à l’origine de l’adaptation cinématographique se dit quant à elle déçue que cette controverse ait pris le dessus sur le véritable message du film qui « n’a pas été évident à faire », parce que « les chaînes n’ont pas été évidentes à convaincre », révèle-t-elle.

Une lutte difficile et quotidienne contre les préjugés et loin d’être gagnée : « Le jour où l’on pourra regarder une grosse, avec des cheveux gras, qui mange sans que l’on soit choqué, là on aura gagné », conclu Gabrielle Deydier.

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