Le lien social, plus que jamais au cœur du bien vieillir

Alors que les plus de 60 ans pourraient représenter un tiers de la population française en 2040 selon Santé Publique France, le nombre de personne âgées dépendantes pourrait atteindre 2,3 millions de personnes d’ici 2060. Dans ce contexte de vieillissement de la population, la perte d’autonomie et la détérioration de la qualité de vie sont au centre des préoccupations. Si les soins médicaux sont essentiels pour le bien vieillir, la crise sanitaire liée au Covid-19 est venue rappeler l’importance du lien social pour le bien-être des personnes âgées.

« Proposer de l’animation individuelle et personnalisée à domicile de manière à lutter contre l’isolement et favoriser le lien social » : c’est la mission que s’est donnée Pauline Guégan, animatrice sociale à domicile auprès de personnes âgées exerçant dans la région de Vannes. Après dix années dans un Ehpad, cette ancienne aide-soignante s’est reconvertie fin 2020. Sur le site Internet qu’elle a créé sur la plateforme Hubside pour présenter son activité, elle explique ce qui a motivé sa démarche : « souvent, ce qui semble manquer aux personnes âgées à leur domicile est une activité qui leur permet d’entretenir leur potentiel, aussi bien physique que mental et d’avoir un contact avec l’extérieur autre que médicalisé ou focalisé sur l’entretien ménager ». Pauline Guégan propose différentes activités aux seniors à qui elle rend visite : activités cognitives, création artistique, jeux de société, cuisine… Toutes contribuent à maintenir l’autonomie des personnes, à « favoriser la confiance en soi, la curiosité et l’ouverture d’esprit » et à « maintenir et améliorer les capacités cognitives et physiques », précise-t-elle sur sa page Hubside. Pour Pauline, si le maintien de l’autonomie passe nécessaire par un suivi médical, il ne saurait pour autant suffire à garantir le « bien vieillir ».

Faire dialoguer les mondes sanitaires et sociaux

La notion de « vieillissement réussi », théorisée à la fin du XXe siècle par les chercheurs en gérontologie John W. Rowe et Robert L. Kahn suppose en effet le maintien d’un certain niveau de fonctionnement cognitif et le maintien d’activités créatives ou sociales. Inspirée par cet aspect social du bien vieillir, Alexandra de Saivre a créé « Tous en Tandem », un réseau d’étudiants qui a pour objectif de favoriser « le bien vieillir des aînés autour d’ateliers culturels ». Selon elle, maintenir l’autonomie passe par la prévention : « Prévenir, c’est guérir et cela me semble tellement vrai en prenant de l’âge. Prévenir en faisant des activités physiques, prévenir en faisant des activités cérébrales, prévenir en ayant une alimentation adaptée, enfin prévenir en voyant des gens, en échangeant quotidiennement avec sa famille, ses voisins, ses commerçants… ». Récemment, la crise sanitaire est venue brutalement rappeler l’importance de cette prévention, qui passe par le maintien du lien social, dans le bien-être des personnes âgées. De nombreuses personnes en situation d’isolement ont souffert des restrictions sanitaires. D’après un rapport publié par l’association « Les Petits frères des pauvres » en juin dernier, 720 000 personnes âgées n’ont eu aucun contact avec leur famille pendant le premier confinement.

Pour Olivier Guérin, président de la Société Française de Gériatrie et de Gérontologie (SFGG), cet isolement des personnes âgées est dû aux cloisons qui subsistent en France entre « le monde sanitaire et le monde social ». Il appelle de ses vœux un décloisonnement, pour mieux faire dialoguer social et médical : « on a oublié en France que la santé est médico-psycho-sociale. En dehors de la maladie, nous n’avons aucune structure organisée concernant le psychosocial. Le bien-être psychique n’est pas bien pris en compte. Ce décloisonnement est totalement nécessaire pour qu’on soit en capacité de réponse pour les crises ultérieures. »

Maintenir le lien social, une nécessité au cœur de la « Silver Economy »

Beaucoup d’entreprises se saisissent de cette question, et tentent de replacer le lien social au cœur du bien vieillir. Parfois avec un certain succès, comme Famileo.com :  cette startup, lauréate du prix Pass French Tech en 2019, permet aux membres d’une famille de poster des photos ou des messages sur une conversation : l’algorithme les met en page sous la forme d’une gazette qui est ensuite envoyée aux aînés. A l’été 2020, Famileo recensait 700 000 utilisateurs actifs, séduits par cette possibilité offerte de maintenir le lien social familial.

Parce que le lien social passe aussi par l’entraide entre les habitants de proximité, la plateforme Courseur propose quant à elle une solution pour faciliter les courses du quotidien : quand un utilisateur fait ses courses, il peut être sollicité par un autre utilisateur pour lui apporter des articles.

Pour un certain nombre de startup, la crise et le confinement ont constitué une opportunité de démontrer leur potentiel. La plupart du temps, en capitalisant sur le digital, ainsi que l’explique Nicolas Menet, directeur général de l’association Silver Valley: « Les acteurs du secteur ont pris conscience que la technologie est un levier essentiel pour accompagner les personnes vulnérables et plus généralement la longévité. Le Covid-19 a démontré que la société de la longévité doit compter sur le numérique pour s’épanouir. ».

 

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