Argentine : un pays divisé sur la question de l’avortement

Ce mercredi 8 août 2018, les sénateurs argentins sont appelés à voter pour ou contre la légalisation de l’avortement au cours des 14 premières semaines de grossesse. Alors que l’Irlande vient de légaliser l’avortement au mois de mai dernier, l’Argentine, fervent pays catholique et conservateur fera-t-il de même ce jour ? Pas si certain.

Les sénateurs se prononcent aujourd’hui

L’avortement est interdit en Argentine et, bien qu’il soit légal en cas de viol ou si la grossesse présente un risque pour la vie de la femme, les médecins refusent souvent d’effectuer l’intervention. Le chef d’Amnesty International lui-même qualifie les lois latino-américaines sur l’avortement de « violence à l’égard des femmes ».

Ce mercredi, le débat atteint son point culminant puisque les sénateurs argentins doivent se prononcer pour ou contre une loi dépénalisant l’avortement au cours des 14 premières semaines de grossesse. Si elle est approuvée, l’Argentine deviendrait le plus grand pays d’Amérique latine à légaliser la procédure.

Légalisation en Argentine, répercussions profondes en Amérique latine

Bien que l’avortement soit légal dans quelques juridictions — Mexico, Cuba, Uruguay, Guyane et le département français d’outre-mer de la Guyane française — la région dans son ensemble suit des lois très restrictives et comprend trois pays où la procédure est interdite dans tous les cas : El Salvador, la République dominicaine et le Nicaragua.

« La légalisation en Argentine aurait un effet profond sur le reste de l’Amérique latine, où elle reste interdite dans tous les autres grands pays », déclare aux colonnes du Guardian la législatrice Victoria Donda, l’un des principaux partisans du projet de loi.

En finir avec les avortements à risque

Les militants des droits de l’homme dénoncent le fait que les interdictions quasi totales de l’avortement dans ces régions ne font que pousser les femmes à rechercher des interruptions clandestines bien souvent très dangereuses et causes majeures de mortalité maternelle. En Argentine, plus de 3 000 femmes seraient mortes au cours des 25 dernières années à la suite d’avortements pratiqués dans des conditions dangereuses, selon Amnesty International.

L’Église catholique et les chrétiens évangéliques se sont fortement opposés au projet de loi dont le Congrès est saisi. C’est pourquoi la légalisation aurait un effet profond en Amérique latine, où l’avortement reste interdit dans les autres grands pays. Le pape François, d’origine argentine, reste profondément impliqué dans la politique de son pays et il ne cache pas son opposition au projet de loi. Lundi, le quotidien Clarín a rapporté qu’il a demandé aux législateurs anti-avortement de faire pression sur les autres législateurs pour qu’ils rejettent le projet de loi.

« Ni una menos »

La réforme est cependant défendue de plus en plus intensément par le mouvement féministe argentin. Une vague de protestations a vu le jour, contre la violence faite aux femmes, sous le slogan « Ni una menos » (« Pas une de moins », ce qui signifie qu’il n’y a plus de femmes perdues à cause de la violence sexiste).

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Des militants pro-choix déguisées en personnages de la série « The Handmaid’s Tale » lors d’une manifestation à Buenos Aires. Les costumes sont devenus un symbole de protestation.

D’après les sondages, une petite majorité des Argentins (60 %) est favorable à un élargissement des conditions légales d’avortement. Le président Mauricio Macri quant à lui, s’est déclaré « pro-vie », mais a ajouté qu’il n’opposera pas son veto à la loi si elle est approuvée par le Sénat.

Trente-sept sénateurs se sont engagés à s’opposer au projet de loi, contre 31 en faveur du projet de loi, et les militants pro-choix espèrent qu’une mobilisation massive planifiée de femmes en dehors du Congrès fera pencher la balance dans les 72 sièges du Sénat.

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