Zao, cette application qui change les visages

Zao, c’est une nouvelle application chinoise qui permet de remplacer le visage de vos acteurs préférés…par le vôtre ! Cette application conçue comme un divertissement, soulève pourtant quelques inquiétudes…

Vous rêviez d’être John Snow dans Game of Thrones, ou Kate Winslet dans Titanic ? A défaut de monter les marches cannoises afin d’être récompensé par votre performance, vous voir à l’écran à la place de ces acteurs est aujourd’hui chose possible ! C’est ce que permet l’application Zao, dont le terme mandarin veut dire « fabriquer, concevoir ».

Une application « deepfake », créée par la société chinoise Momo, permet donc de remplacer le visage d’un acteur ou d’une actrice par celui d’un utilisateur. Ce dernier, une fois l’application téléchargée, envoie une seule photo et grâce à des filtres dynamiques, se verra incarner à l’écran les rôles de ses stars préférées.

Cette application gratuite nécessite une adresse mail chinoise pour pouvoir s’inscrire. Elle est devenue la plus téléchargée en Chine.

Bluffant mais inquiétant

Bluffante, cette application,soulève tout de même de réelles questions quant à la conservation des données personnelles. Comme stipulé noir sur blanc dans les conditions d’utilisation, ces données appartiennent en effet dès lors qu’elles sont enregistrées, à la société Momo.

Solange Ghernaouti, professeure de cybersécurité à l’Université de Lausanne, a expliqué dans une vidéo à nos confrères du Parisien : « On peut simuler des comportements de personne, on peut reproduire des personnes, on peut adapter des gestes à un visage, etc. (…) Un des risques majeurs c’est celui du consentement éclairé des utilisateurs sur l’utilisation de leurs données : il faut savoir à quelles fins elles seront utilisées. » De nombreuses associations s’inquiètent de la manipulation, notamment à des fins électorales, du rassemblement de ces données personnelles.

Manipulation des masses

« Ça ouvre à la perversité et à une manipulation assez importante. On peut faire croire et simuler des discours, c’est vraiment de la manipulation de masse qui va conduire peut-être à des actions de votation et de vote d’actes démocratiques ou antidémocratiques. C’est de la manipulation psychologique, de la manipulation d’information. Ça rentre dans des techniques qu’on pourrait qualifier de guerre psychologique, de manipulation de la foule. », précise Solange Ghernaouti.

En mai 2019, Nancy Pelosi, présidente de la Chambre des représentants s’est ainsi vue ivre lors d’une intervention télévisée, son visage altérée par l’application. Barack Obama avait aussi subi les conséquences de ce « deepfake » puisqu’il est possible aujourd’hui encore de trouver une vidéo créée de toute pièce, dans laquelle il insulte Donald Trump.

Autrement dit, on peut faire faire ou faire dire, n’importe quoi à n’importe qui. Dans tous les cas, cette application est probablement la première qui interrogera sur la véracité d’une image. Alors que dans l’inconscient collectif une image existante montre la réalité, cette nouvelle technologie poussera à « questionner sur l’information, la connaissance et instaurer un doute incroyable ».