Les Français et la pause déjeuner : je t’aime, moi non plus 

38 minutes. C’est le temps consacré par les Français à la pause-déjeuner en 2019, selon les données récoltées par une récente étude CRISCO/Cervia sur les comportements et attitudes alimentaires des Franciliens. À titre de comparaison, en 1975, les Français prenaient en moyenne 1h38 pour déjeuner le midi, d’après le baromètre INPES 2008. Doit-on s’inquiéter ? Va-t-on vers une disparition totale de ce sacro-saint temps de pause ? 

Dans un récent rapport parlementaire révélé par le journal The Guardian, les députés anglais réclament 75 minutes de temps de pause déjeuner pour les écoliers anglais. D’après les spécialistes qui ont travaillé sur cette étude, la durée actuelle de 55 minutes des repas aurait un impact négatif sur la concentration, la sociabilité des élèves et la santé. La question se pose également pour les adultes. 

En 44 ans, entre 1975 et 2019, le temps consacré au déjeuner a considérablement baissé et aujourd’hui, certaines personnes ont à peine quelques minutes pour avaler un sandwich avant de repartir travailler. Seulement voilà, quand on sait que le déjeuner couvre 40% des apports énergétiques de la journée, il semble primordial de prendre une réelle pause pour recharger les batteries. Comme le précise le Dr Jean-Michel Lecerf, médecin nutritionniste à l’Institut Pasteur à Lille : « Quand on mange trop rapidement, le corps ne nous alerte pas à temps sur le trop-plein de quantités ingurgitées, explique l’expert en nutrition. En moyenne, il faut attendre trente minutes pour que les mécanismes de rassasiement se mettent en place ». 

Une pause déjeuner trop courte ne favorise pas le bon déroulement d’une journée de travail 

En France, l’article L3121-33 du Code du travail instaure l’obligation de faire un break d’au moins 20 minutes en milieu de journée, ce qui reste en dessous des 30 minutes nécessaires au bon fonctionnement de l’organisme. Une pause déjeuner trop courte ne permettrait pas d’ingérer les aliments et l’énergie suffisante pour le bon déroulement d’une journée. Lorsque le temps est trop court, on fait souvent l’impasse sur l’entrée et le dessert tout en mangeant beaucoup trop vite. Un repas doit pourtant être composé d’une multitude d’aliments différents : protéines (animales ou végétales), de féculents, d’une grosse part de légumes, de matières grasses, d’un produit laitier et d’un fruit. « Même si le repas est court, il faut toujours être attentif à la façon dont on l’ingère », insiste le Dr Jean-Michel Lecerf. Il faut donc faire attention à bien mâcher, à bien mastiquer pour que les enzymes digestives se libèrent plus facilement. 

Vers la fin de la pause déjeuner ? 

À ce rythme-là, la pause déjeuner pourrait-elle être amenée à disparaître ? Selon le psychologue du travail Adrien Chignard, c’est inenvisageable :  « Manger reste un plaisir pour la majorité des Français, souligne-t-il. Vous voyez très rarement des gens déjeuner dans les transports en commun, alors qu’au Royaume-Uni cette pratique ne choque personne… Le premier rempart contre la dépression psychologique dans une entreprise, c’est le soutien des pairs ». Cette cohésion est bénéfique pour les salariés, mais également pour les patrons souvent soucieux du bien-être et donc de la productivité de ses employés. 

Ce qui doit ressortir de tout cela, c’est que chacun doit pouvoir se sentir libre de mener son temps de pause comme il le souhaite. Certaines personnes préfèrent une passe déjeuner au calme par exemple, après une matinée agitée passée dans un open space bruyant. Comme le conclu Adrien Chignard : « Dans tous les cas, ce moment doit être contrastant, affirme le psychologue du travail. En se focalisant sur autre chose que les e-mails et la pile de dossiers, on se détend et on peut ainsi restaurer nos capacités attentionnelles. » 

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